Aller au contenu principal

Conjuguer dialogue et impératifs techniques et financiers : la délicate mission de la CNAR

Crée par le conseil d’administration de l’Andra en 2007, la CNAR (Commission nationale des aides dans le domaine radioactif) intervient pour définir l’usage des subventions publiques consacrées à l’assainissement de sites pollués par la radioactivité. Une mission complexe, à forts enjeux techniques et financiers mais surtout humains. Les explications de Didier Dubot, le nouveau président de la CNAR.

Décontamination d'une habitation à Gif-sur-Yvette
Didier Dubot, président de la CNAR

Didier Dubot a été nommé président de la CNAR par le ministre de la Transition écologique et solidaire en avril 2019. Cet ingénieur-chercheur au CEA, aujourd’hui à la retraite, connaît très bien son dossier : ancien directeur de la section assainissement du site du CEA de Fontenay-aux-Roses, il fut également membre de l’Unité mobile pour la caractérisation de sites de l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique). Une mission pour laquelle il a contribué à établir des diagnostics de sites contaminés aux quatre coins de la planète.


Comment définiriez-vous la mission de la CNAR ?

La CNAR intervient dans les cas où des habitations ou des parcelles contaminées, principalement par de la radioactivité naturelle renforcée (RNR), sont orphelines, c’est-à-dire lorsque le propriétaire est « défaillant » : soit parce qu’il a disparu ou parce qu’il n’est plus solvable. Il peut s’agir d’anciens sites industriels ou de propriétés foncières ou immobilières sur lesquelles des contaminations radioactives résiduelles sont détectées.

 

Site de l'ancienne usine d'Orflam-Plast en cours d'assainissement (Pargny-sur-Saulx)

Comment la CNAR intervient-elle précisément ?

Sur la base du diagnostic initial fait par l’Andra, la CNAR fixe le niveau des subventions publiques à allouer à l’opération et donne son avis sur la stratégie de traitement en fonction de critères techniques, financiers et des possibilités de stockage des déchets générés. Nature des travaux, degré de réhabilitation, attributions financières, solution de relogement : nous menons les débats pour trouver le meilleur consensus entre tous ces impératifs. L’objectif, bien sûr, étant de supprimer tout risque sanitaire significatif pour l’homme et l’environnement.

La CNAR est là aussi pour assurer la médiation entre le technicien et le particulier qui sollicite un financement pour faire dépolluer son bien. Le plus souvent, ce dernier n’a pas beaucoup de connaissances sur la nature des opérations à mener.

 

Qu’est ce qui fait la complexité d’un chantier de dépollution ?

Une opération de dépollution est très variable : certains chantiers peuvent durer deux ans pour une maison d’habitation avec des personnes à reloger… d’autres ont commencé il y a quinze ans et peuvent engager plusieurs centaines de milliers d’euros. La complexité de ces opérations réside dans le fait qu’avant d’assainir, il faut connaître l’étendue de la pollution et les niveaux de radioactivité : pour cela, il faudra faire beaucoup d’investigations et d’analyses qui peuvent être très coûteuses. On effectue des évaluations radiologiques dans un périmètre… mais parfois ce périmètre peut s’avérer très localisé ou beaucoup plus étendu : il y a une diversité incroyable de configurations, sans oublier que certaines de ces activités se sont déroulées il y a parfois plus d’un siècle.

 

Site de l'ancienne usine d'Orflam-Plast réhabilité (Pargny-sur-Saulx)

Quels sont les enjeux pour la CNAR ?

Trouver le meilleur compromis possible. Il faut avoir en tête qu’enlever la totalité de la radioactivité est souvent très difficile. L’enjeu consiste ainsi à estimer le niveau de radioactivité résiduel qu’il est acceptable de laisser en place, c’est-à-dire qui n’engage absolument aucun risque pour l’homme et la nature. Cette décision fait l’objet d’un dialogue entre le particulier ou la collectivité, qui subit cette pollution, et l’Andra et la CNAR.  Notre travail consiste alors à mettre en place des servitudes afin d’adapter l’usage futur du site à la radioactivité résiduelle présente. Par exemple un site réhabilité peut devenir un parking, cet usage n’engageant aucun danger compte tenu de la radioactivité résiduelle restant sur place.

 

Comment pesez- vous dans les décisions qui sont prises ?

Décider d’une dépollution, et de son financement, doit être validé en commission, et toujours en prenant en compte l’avis du particulier ou de la collectivité. Il est important que les décisions soient prises dans le consensus. Actuellement nous avons six ou sept dossiers en cours et deux ou trois autres sont en cours de discussion avec l’Andra. J’aime avoir des échanges réguliers avec l’Agence et maîtriser la totalité du dossier pour en imaginer les différentes issues. Ensuite, je prends mon bâton de pèlerin, je discute avec les ONG, j’essaye de trouver le meilleur compromis afin que tout le monde abonde dans le même sens.

 

 

Qui siège à la CNAR

La CNAR comprend :

  • Des représentants des autorités : ASN, direction générale de la Prévention des risques, direction générale de l’Énergie et du Climat ;
  • Des représentants des établissements publics techniques (CEA, IRSN, établissement public foncier d’Ile de France, Ademe) ;
  • Des représentants du monde associatif (France Nature Environnement, Robin des Bois) ;
  • Un élu désigné par l’Association des maires de France.